DES RESULTATS À PRENDRE AVEC DE LA HAUTEUR

Publié le par Olivier

DES RESULTATS À PRENDRE AVEC DE LA HAUTEUR

Malgré plus de 50% de participation, les résultats autorisent une analyse de ce qui constitue plus qu'un gigantesque sondage représentatif de l'opinion des français.

 

Les défaites

 

Cela peut paraître paradoxal au moment où la crise met en évidence la pertinence des solutions traditionnelles des socialistes (remise en cause du « tout marché », intervention de l'Etat, etc.) en même temps que la faillite de l'ultralibéralisme.

Il est vrai que l'histoire nous apprend que les périodes de crise (comme celle des Gilets Jaunes) ne sont pas les plus propices aux victoires de la gauche. Les électeurs se réfugient alors plus directement vers ceux qui incarnent plus que nous l'ordre, la sécurité, le repli sur soi. Mais la défaite des socialistes s'explique aussi par leurs propres erreurs.

A l'origine de la construction de l'Europe, et ayant accompagné et soutenu tout son processus de développement, les socialistes sont, aux yeux des travailleurs européens, coresponsables de ce qu'est l'Europe aujourd'hui : une vaste zone de libre-échange ouverte à tous vents; une Europe qui leur apparaît plus un problème qu'une solution à leurs difficultés (pouvoir d'achat affaibli, délocalisations et licenciements, pauvreté et inégalités croissantes, mise en cause des services publics...).

l'Europe déçoit et ne protège pas. Une Europe que les travailleurs européens ne se sont jamais appropriés tant sa construction s'est faite sans eux (élargissement à 27 par exemple), et parfois même contre eux. Alors, nous payons la facture !

En France, la distension de nos liens avec la population salariée se confirme depuis les présidentielles de 2002, celles de 2007, et jusqu'à ces européennes de 2019 (malgré une "pause" a eu lieu en 2012, avec l'élection de Hollande), même si les français nous gardent leur confiance quand il s'agit de gérer les affaires locales (municipales, cantonales et régionales), souvent en raison de la qualité de nos cadres, du dévouement et de la compétence de nos dirigeants intermédiaires.

Nos spécialistes sondeurs nous le confirment : ce sont les couches salariées et défavorisées qui se sont tournées vers un vote de rejet, en favorisant l'extrême droite à gonfler les rangs nationalistes de Bruxelles. Quitte à cautionner le libéralisme, les électeurs ont préféré l'original à la copie. D'autres se sont abstenus ou se sont détournés vers d'autres votes.

 

LREM: une victoire en trompe-l’œil

Les Marcheurs ont bien raison d'éviter tout triomphalisme. LREM sait que ces 22% aux européennes sont en retrait de 2 points par rapport au score de premier tour de Macron lors des présidentielles de 2017. Elle sait que ces 22% constituent un plafond difficile à dépasser tant elle a absorbé et asphyxié toute autre formation politique de droite, comme de gauche. Rappelons qu'en 2004, les listes UMP et ses alliés (Centre et Divers Droite) qui soutenaient le gouvernement d'alors obtenaient plus de 41% des suffrages. Avec qui faire alliance, demain aux Municipales ? Puis aux Régionales et cantonales et après-demain à la présidentielle ? La réserve de LREM est très faible, car elle continuera à "recevoir à la maison" les déçus des Républicains.

Malgré son succès apparent, cette victoire est illusoire. Macron est désavoué. Ayant tout absorbé, il n'a plus guère de réserves de voix, dans une élection à deux tours (Municipales 2020, Régionales 2021, Cantonales 2021, Présidentielle 2022).

Même si l'on examine le nombre de députés élus, LREM est loin de la majorité absolue et devra faire alliance, parfois avec ceux que les amis de Macron ont critiqués hier.

Seule, elle n'en a que 23. Avec le FN, cela plafonne à 43. quasiment autant que les autres tendances nationales réunies.

 

Une gauche plus forte mais éparpillée

Le sous-total de la gauche, même dans ces circonstances, est prometteur pour les années à venir. C'est nettement au dessus du sous-total de la droite. Et c'est la victoire possible si la gauche se met en capacité de déclencher un processus unitaire.

 

Les Verts : un vote refuge ?

Certes, les listes conduites par Yannick Jadot ont bénéficié d'un transfert de voix en provenance de l'électorat traditionnel du PS, déçu par l'écart entre son programme et sa pratique, par son absence d'incarnation nationale forte, par ses divisions, etc. Cet électorat ne demande qu'à nous revenir sous la condition que nous redevenions attractifs...

Certes, les listes écologistes ont bénéficié de l'énorme opération médiatique en faveur de la destruction de la Planète, quelques jours avant le vote.

Mais la crise économique que nous vivons, a aussi mis en évidence l'urgente nécessité d'un autre modèle de développement, déjà souhaité par le grand nombre en raison des perspectives désastreuses du réchauffement climatique et de l'épuisement de certaines ressources naturelles.

Le thème écologiste est transversal, et aucun autre modèle de développement ne saurait s'imposer sans la substitution des exigences de l'intérêt général à la logique du profit maximum et immédiat. Nous, socialistes, devrions être les premiers porteurs de cette exigence-là. Nous l'avons inscrite dans notre déclaration de principes, mais nous n'avons pas su populariser notre orientation avec la force et la clarté nécessaires.

Le succès de Jadot ne doit pas nous effrayer et nous inquiéter. Leurs thèmes de campagne et leurs volontés sont aussi le plus souvent les nôtres. La perspective de l'alliance avec eux est largement ouverte, comme elle fonctionne presque toujours dans les structures où nous siégeons ensemble.

 

A notre gauche, des alliés naturels...

Hamon, LFI, PCF, LO et autres partis de Gauche totalisent environ 15 %. Ce sont largement des voix qui proviennent de nos insuffisances passées à mener le combat contre les orientations libérales européennes, comme de nos erreurs politiques dans l'exercice du pouvoir dans notre propre pays.

 

Des résultats désastreux pour notre Parti...

On pourrait à loisir lister et développer les causes exogènes de notre échec : attitude des médias refusant la mise en place d'une campagne mobilisatrice, amplifiant le phénomène abstentionniste, niant notre programme au profit de l'exposition répétée des querelles de personnes ; manœuvres de Macron plaçant le débat uniquement sur le score du Rassemblement National, etc.

Nous aurions raison de dire qu'il faut centrer notre réflexion sur nos propres carences. On l'a dit plus haut, notre principale faiblesse est notre passé dont nous peinons à amoindrir le discrédit engendré par notre accompagnement du libéralisme au niveau européen, et par nos erreurs de gestion gouvernementale quand nous y avions les responsabilités principales. C'est pour cela que nous sommes en convalescence.

On pourrait allonger la liste de nos erreurs, mais avons-nous en premier lieu été audibles ?

 

Que faire maintenant ?

Les analyses qui précédent indiquent clairement la voie à suivre : l'unité de la gauche est à reconstruire.

Il faut proposer à l'ensemble des forces de gauche, sans exclusive, aux Verts d'Europe Ecologie, au PRG, au Front de gauche, etc de construire ensemble une alliance sur un projet et un programme commun de transformation progressiste de la société : un autre partage des richesses, défense, développement et amélioration des services publics, sécurité sociale professionnelle, nouveau modèle de développement durable, énergies renouvelables, ferroutage, augmentation du SMIC et des retraites, nouvelles modalités de contrôle et d'interdiction des licenciements boursiers, etc. Il faut tout mettre sur la table, et ouvrir des discussions, dont certaines phases pourraient avoir un caractère public, afin que tous les citoyens puissent s'emparer des débats.

Parallèlement, il faut ouvrir la discussion entre nous et avec nos partenaires sur les modalités de désignation d'un candidat commun de la gauche dès le premier tour de l'élection présidentielle, si cela semble possible, ou à défaut sur les modalités de gestion de la concurrence au premier tour.

Il faut aussi dès maintenant aborder les conditions programmatiques et de constitution des listes unitaires aux prochaines élections municipales, régionales et départementales.

Il faut, pour balayer Macron et les politiques ultralibérales, construire d'urgence un nouvel arc-en-ciel, rouge, rose, vert, sans prétention hégémonique de quiconque, et dans le respect de chacune des composantes.

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